Paradoxalement, c’est aujourd’hui au moment où les formations métiers d’art bénéficient d’un engouement jamais atteint auparavant que l’ensemble des métiers doit faire face à une crise profonde de la formation aux métiers d’art. Dès 2018, au moment du vote de la loi « Avenir professionnel » qui a introduit le processus de la déconstruction des formations avec une redistribution des rôles des acteurs traditionnels, les professionnels des métiers d’art à travers leur syndicat – Ateliers d’Art de France – s’étaient interrogés sur le déséquilibre qu’introduisait le DNMADe dans la formation des futurs professionnels des métiers d’art et avaient dénoncé le décalage entre le contenu d’une formation généraliste et les besoins réels des futurs professionnels. À l’heure où les premiers diplômés du DNMADe font leur entrée sur le marché du travail, Ateliers d’Art de France, via la voix d’Aude Tahon sa Présidente, fait le point sur les dérives de l’ensemble du système de formation aux métiers d’art, un système en crise conduisant à la lente et constante détérioration des formations de toute la filière. Le nouveau programme conduit à l’éloignement des étudiants de la pratique intensive et à la destruction de la place centrale de la démarche de création par le travail de la matière,. Les professionnels qui ont accueilli des stagiaires et des apprentis au cours de cette année de crise sanitaire parlent d’une génération de futurs professionnels des métiers d’art sacrifiée. Pour eux, elle risque de ne pas avoir la maîtrise technique attendue et nécessaire ni la validation des connaissances, permettant de garantir leur insertion sur le marché du travail, ni l’accès au marché. Malgré la recrudescence, ces dernières années, du nombre d’adultes en reconversion dans le secteur des métiers d’art, la voie de la formation continue modifiée par la loi<, entraîne à plus ou moins long terme, la disparition de centres de formations dans les métiers d’art, et avec eux, la perte de nombreuses offres de formations qualitatives proposant l’acquisition de savoir-faire et de compétences.
Les professionnels de métiers d’art et les acteurs de la formations aux métiers d’art formulent 6 recommandations essentielles à la formation aux métiers d’art :
- Une démarche de création enseignée adaptée aux spécificités des métiers d’art : un artisan d’art est par définition un créateur qui n’est pas dans une démarche descendante nourrie de concepts, mais d’une démarche ascendante construite sur son savoir-faire et la connaissance de la matière.
- La reconnaissance de l’atelier comme lieu indispensable de formation.
- L’allongement du temps de formation en atelier d’art : la nécessité d’allonger le temps de formation et de veiller à la pratique et l’apprentissage en atelier. L’apprentissage des techniques, le développement de la créativité par la connaissance et la maîtrise du travail de la matière. Pour ce faire, l’atelier doit être compris comme un lieu d’apprentissage, être valorisé et pensé dans un processus de formation à part entière.
- L’implication des professionnels de métiers d’art et des enseignants dans la définition des référentiels de formation.
- L’harmonisation des partenariats entre les professionnels de métiers d’art et les acteurs de la formation.
- La mise en avant des métiers d’art dans l’orientation des jeunes.
Pour Aude Tahon, c’est bien le rôle de l’État de reconnaître ce vivier dynamique d’entreprises créatives, et de préserver l’avenir des nouvelles générations qui veulent s’engager dans les métiers d’art.