L’Observatoire du Patrimoine Religieux, association non-confessionnelle oeuvrant au rayonnement et à la préservation du patrimoine religieux français, dresse un état des lieux de la situation du patrimoine cultuel. 

En dépit de l’excellent travail de nombreux maires ou responsables des lieux de culte, le patrimoine religieux reste fragile et menacé. Vols à répétition, ventes et transformations de lieux de culte, destructions et – pire encore à long terme – abandons purs et simples, constituent les premières menaces. A celles-ci, la crise financière pose à moyen terme la question du financement de ce patrimoine identitaire auquel les Français sont très attachés. L’affaiblissement des finances publiques et l’endettement considérable de l’Etat et des collectivités locales sont autant d’hypothèques sur l’avenir de l’ensemble extraordinaire des édifices cultuels français ; des milliers de monuments religieux pourraient disparaitre d’ici à 20 ans.

Un patrimoine exceptionnel menacé

Les patrimoine religieux français forme un ensemble unique de près de 100 000 édifices (soit en moyenne 2.5 par commune), dont 15 000 protégés au titre des monuments historiques, parmi les plus belles réalisations architecturales du millénaire écoulé.

Si de nombreuses communes, parfois rurales et modestes, restaurent et font vivre leurs églises de façon remarquable, à l’échelle nationale le patrimoine le plus ancien n’est pas toujours entretenu ou restauré à sa juste valeur. Bien entendu, il convient de saluer les démarches exemplaires de certaines municipalités telles que Belfort, qui a créé une fondation en faveur de son patrimoine en février 2012, ou de petits villages qui entretiennent et restaurent rigoureusement leur seul ou principal monument.

Pourtant, de nombreuses églises, y compris à Paris, sont, depuis de nombreuses années, couvertes de bâches ou de grillages de protections. Dans la capitale, le « plan églises » mis en place dans les années 1990 face à l’urgence de la situation s’est effiloché à partir de 2004 à tel point que les plus grandes églises de Paris nécessitent aujourd’hui plusieurs dizaines de millions d’euros de travaux. Le patrimoine appartenant à l’Etat est également en péril, le Panthéon, exige à lui seul une centaine de millions d’euros de travaux. St-Germain des Prés, la Trinité, Saint Augustin, Saint Philippe du Roule, mais aussi le Temple des Billettes ou la synagogue de la rue de la Victoire (la plus importante de France) ont besoin d’une restauration suivie et d’un entretien rigoureux.

Enfin, comme de nombreux villages, la ville de Paris donne son accord pour la destruction ou la « privatisation » d’édifices cultuels, dont l’église Sainte-Rita (Paris 15ème, destruction autorisée par la Ville) ou la chapelle de l’Ancien Hôpital Laennec, vendu par l’AP-HP à un promoteur.

L’OPR est ainsi le pionnier d’un combat en faveur de la réhabilitation et de la réouverture au public de ces bâtiments délaissés. Il se mobilise notamment en faveur de la préservation, du classement et de la réouverture au public de la chapelle de l’hôpital St-Vincent de Paul (14ème arrondissement), lequel fermera ses portes en 2012.

Si plus de 200 églises sont ainsi immédiatement menacées en France métropolitaine, des milliers d’autres sombrent dans l’oubli. Enfin, le patrimoine régulier catholique, chapelet de couvents et d’abbayes émaillant le territoire, subit des assauts redoutables de la part des autorités religieuses elles-mêmes. La disparition pure et simple de nombreuses communautés religieuses conduit à la disparition de nombreux édifices, détruits ou vendus à des promoteurs.

Ce phénomène n’est pas nouveau, puisque notre pays a traversé de nombreuses phases de destructions patrimoniales. Heureusement, elles sont aujourd’hui moins nombreuses, ou moins visibles, du fait d’une meilleure mobilisation de l’opinion publique, aiguillonnée – notamment – par l’action de l’Observatoire du Patrimoine Religieux. Elles ne constituent cependant que la partie immergée de ce phénomène de désaffection.

L’ampleur du désastre dépendra de l’intensité de la crise financière

La loi de 1905 impose, certes, aux communes d’entretenir leur patrimoine religieux. Néanmoins, dans le contexte économique actuel, de plus en plus de collectivités n’arriveront plus à financer l’entretien élémentaire des lieux de culte dont elles ont la charge, sans parler des restaurations de grande ampleur. En effet, une à deux fois par siècle, la maçonnerie et la toiture des bâtiments sont à reprendre, et il en va de même tous les vingt à trente ans pour l’électricité et le chauffage, sans parler des autres besoins de restaurations (tableaux, fresques, sculptures, vitraux…). Il s’en suit que dans les 20 prochaines années, 20 à 30% des monuments religieux français devront être restaurés.

La bonne volonté des élus, si elle demeure indispensable, ne sera plus suffisante pour garantir la pérennité de notre patrimoine, et de nouvelles solutions devront être trouvées. Celle-ci passe vraisemblablement par trois leviers d’action :

– Une action en amont, pour éviter, repousser ou étaler les travaux les plus onéreux,

– La multiplication des actions citoyennes, telles que des chantiers d’insertion pour certains travaux qui peuvent être assurés par des bénévoles, sous la responsabilité d’un professionnel,

– La générosité du public, des grands mécènes comme des petits donateurs, qui repose a minima sur le maintien des avantages fiscaux existants

A ce titre, le rôle des pouvoirs publics sera capital, et permettra de réduire l’ampleur du désastre annoncé.

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