Les premières restaurations de la cathédrale de Reims ont commencé dès 1610, alors que l’on remplace des statues des voussures du portail central. Plus tard, au 18e siècle, les dégradations dues à la pluie et au gel exigent d’autres travaux sur l’importante statuaire.

Au 19e siècle, nouvelles interventions.

Les architectes Arveuf puis Viollet-le-Duc prennent les choses en mains. Eugène Millet, Victor Ruprich-Robert, Denis Darcy, Paul Gout leur succèdent au fil des années. Aujourd’hui, Frédéric Murienne, conservateur régional des Monuments historiques à la Drac de Champagne-Ardenne, explique : « À l’époque de la première guerre mondiale, il y avait, devant le portail nord, un grand échafaudage en bois, qui a été atteint par un obus incendiaire. Il mit le feu à l’ensemble de la structure. La cathédrale servait alors d’hôpital de campagne, où l’on recueillait une majorité de blessés allemands. Ceux-ci étaient allongés sur des paillasses facilement inflammables. Le désastre fut terrible. » Les flammes pénétrèrent dans l’édifice par la grande rose. La toiture se mit à fondre : les gargouilles crachèrent 400 tonnes de plomb en fusion. La coloration ocre de la pierre, que l’on remarque en bon nombre d’endroits, est précisément due à cet incendie. Trois cents autres obus s’abattirent sur la cathédrale, et ce fut un miracle qu’elle ne s’effondrât pas complètement. L’architecte Henri Deneux, succédant à Max Sainsaulieu, fut chargé en 1915 de sauver ce qui pouvait l’être, et de restituer le bâtiment dans sa puissance originelle. Cet homme qui consacra son existence à faire revivre le lieu des sacres de nos rois mourut dans la pauvreté et l’indifférence générale en 1969.

Restaurations et restitutions

Le portail et le contrefort adjacent sont nettoyés par hydrogommage et compresses, puis restaurés, avec les sculptures en place, les dais, les modénatures, les corniches et les gables. Frédéric Murienne précise : « Lorsqu’il faut restituer à l’identique, soit en pierre, soit en ciment pierre, nous travaillons à partir de tous les documents que nous pouvons rassembler, photographies anciennes, moulages de l’existant… L’essentiel de la restauration de cette façade consiste à rétablir une cohérence de lecture, à la fois iconographique et symbolique. » D’une façon générale, bien des éléments de la cathédrale que l’on observe aujourd’hui ne sont donc plus des originaux du Moyen Âge. La Reine de Saba, par exemple, qui se trouve sur l’éperon nord de la façade occidentale, est une copie réalisée en pierre de Courville par le sculpteur Léandro Berra : elle a été posée à la place de la statue originale en décembre 2010. Le budget de la restitution de cette statue s’est élevé à plus de 350 000 euros, pris en charge en majorité par l’association Les Amis de la cathédrale de Reims. Des relevés numériques avaient été effectués sur les moulages du 19e siècle conservés à Paris, à la Cité de l’architecture, afin de retrouver la réalité de la statue médiévale. Un autre élément de la façade, L’Homme à la tête d’Ulysse, est lui aussi une copie en pierre, sculptée par Nicolas Buloz.

Rejointoiements à la chaux 

Les mortiers à la chaux mis en oeœuvre au cours de ces restaurations ont été fabriqués par BCB (Balthazard et Cotte Bâtiment), choisis dans la gamme Tradical, bien connue des professionnels du patrimoine. Tous les rejointoiements, ainsi que les injections dans la maçonnerie, ont été réalisés avec Tradical 70. Il s’agit d’un liant formulé à base de chaux grasse (75 %), de liants hydrauliques (15 %), pouzzolaniques (10 %), et destiné, après mélange avec des agrégats et gâché à l’eau, à réaliser des mortiers de pose pour pierre naturelle, ou des moellons, ainsi que des gobetis, dégrossis et sous-enduits traditionnels, en conformité avec les DTU 20.1 et 26.1. Les finitions ont été exécutées avec Tradical 80 mélangé avec du sable de Saint-Florentin. Tradical 80 est un liant élaboré à base de chaux grasse (85 %) et de chaux hydraulique naturelle (15 %), formulé pour maçonner les pierres tendres et réaliser les gobetis, corps d’enduits et enduits monomasses traditionnels ainsi que les rejointoiements sur des supports anciens. Ces produits offrent des performances constantes, ce qui représente un avantage évident dans le cas d’aussi grands édifices. En outre, on ne risque pratiquement pas de traces de coulures : la pierre de Courville a pour particularité de se tacher facilement, et il faut prendre soin de ne pas maculer les surfaces. Ici, après l’avis à l’eau de chaux pour apporter un aspect patiné, l’intervention est à peine perceptible. S. V. Un anniversaire brillant pour 800 ans de gloire. Le 800e anniversaire de la cathédrale de Notre-Dame de Reims célèbre un monument emblématique de la Champagne et de l’’Histoire de France, classé au Patrimoine mondial de l’’Unesco, connu dans le monde entier pour son architecture exceptionnelle et la richesse de sa statuaire. Lieu du baptême de Clovis par saint Rémi à la fin du 5e siècle et du sacre de la grande majorité des rois de France, la cathédrale acquiert pour le monde contemporain un destin européen après la réconciliation franco-allemande officialisée sous ses voûtes par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer en juillet 1962. Notre-Dame de Reims est tout aussi remarquable sur le plan de l’’histoire de l’’art : fleuron de l’’architecture gothique, elle est souvent qualifiée de référence universelle. Cet anniversaire est encadré par deux dates symboliques : celle du 6 mai célèbre la pose de la première pierre en 1211 après l’’incendie de l’’ancienne cathédrale, un an plus tôt. Et celle du 23 octobre 2011, qui clôturera la manifestation, est la date anniversaire de la messe de la consécration de la cathédrale après sa grande restauration en 1938. Pour accompagner cette année historique, la ville entière se mobilise et se prépare à plusieurs mois de célébrations. Du 6 mai, date de l’’inauguration de ce 800e anniversaire et pendant six mois jusqu’’au 23 octobre, un programme inédit réunissant non seulement une spectaculaire mise en lumière de l’édifice, mais aussi expositions, concerts, spectacles de rue, colloques et conférences, est organisé dans la cité des sacres.

1,3 million d’euros pour de nouveaux vitraux.

L’artiste allemand Imi Knoebel a conçu six nouveaux vitraux destinés à l’’abside, réalisés au titre de la commande publique. Cette création prendra place de part et d’autre de l’œoeuvre de Marc Chagall en 1974 et répond au souhait de couleur qui fait aujourd’’hui défaut dans l’’environnement immédiat. Les vitraux couvriront une surface de 128 m2. Il s’agit d’une composition abstraite dont l’’essence repose sur les couleurs fondamentales, bleu, jaune et rouge, en aplats croisés et superposés. C’est la traduction, selon l’expression de l’artiste, de l’’iconographie des vitraux anciens de la cathédrale « dans un nouveau langage ».La Drac de Champagne-Ardenne, en relation avec la Direction générale des patrimoines et la Direction générale de la création artistique (ministère de la Culture et de la Communication), est le maître d’’ouvrage de cette commande publique, pour un montant de 1,3 million d’euros. Ce projet bénéficie en outre du soutien de mécénats d’’entreprises : la fondation du groupe GDF Suez, les Champagnes Louis Roederer, la Caisse d’’Épargne Lorraine-Champagne ainsi que de personnalités privées qui souhaitent garder l’’anonymat. L’inauguration aura lieu le samedi 25 juin 2011.

Les  dernières campagnes de restauration

Face est de la tour nord de la façade occidentale, remplacement de plusieurs rois par des copies en pierre• Voussures du portail central et les deux piédroits• Faces sud et ouest de la tour sud du bras sud du transept et les deux travées adjacentes de la nef, remplacement des rois présents sur cette partie par des copies en pierre ou des moulages • Galerie des Prophètes face sud du bras sud du transept• Anges des contreforts sud et nord de la nef• Lustres de la nef• Remplacement des statues d’Abraham et d’Aaron par des moulages en ciment pierre• Remplacement de deux des trois statues de l’ébrasement nord du portail nord de la façade occidental• Portail sud et le contrefort adjacent